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Avant de commencer le résumé de la grosse journée du samedi du Concorso d'Eleganza Villa d'Este, je vous ai promis du croustillant, donc voici. Cette année, nous dormons à quatre dans le même appartement que l'an dernier à une dizaine de kilomètres de Cernobbio. Nous sommes passés récupérer les clés à 18h30 vendredi, comme prévu, avant de revenir à Cernobbio diner avec des amis. A notre retour vers 21h00, nous tombons dans un embouteillage plutôt inattendu à trois cent mètres de notre but. Tout le macadam a été gratté pendant le repas. Inutile de vous dire que la journée ayant commencé tôt, voire la veille pour certains, nous éteignons les lumières à 22h30. A 23h00, les bitumeuses entrent en action pour refaire la route à moins de trois mètres de nos fenêtres. Quand on les voit de loin, on n'imagine pas à quel point c'est bruyant mais surtout à quel point ça vibre! Pendant que les autres se demandaient si tout le bâtiment allait finir par se décrocher de la montagne et tomber dans le lac, j'avoue que je m'inquiétais surtout pour ma voiture, garée à moins de 30 centimètres de la route. A trois heures du matin, le boulot était terminé et il faut reconnaitre que la route était superbe au petit matin. Quant à la voiture, elle était juste couverte d'une bonne couche de poussière noire. Franchement, quelle était la probabilité pour que ça arrive, en plus un vendredi soir?

Nous ne sommes donc pas très frais en franchissant les grilles de la Villa à 07h00 du matin. Nous avons le temps de faire un petit tour dans le parking, activité habituellement réservée aux jours de pluie.

       

Voilà deux voitures que nous n'avons pas vues hier.

       

Un incroyable duo de voitures de Grand Prix.

Et un ORNI.

Dehors la CTR3 est toujours là.

Rolls Royce présente une Phantom spécialement construite pour l'occasion.

       

Le samedi se décompose généralement en quatre moments: le rush de l'installation, la glande au media lounge au plus fort de la présence du public, la longue parade et quelques shootings des voitures qui ne sont pas rentrées directement au parking. A 7h30, les premiers bruits de moteurs retentissent . Nous nous installons face à la célèbre descente d'arbres pour accueillir les lève-tôt.

       

       

Ce n'est pas mon endroit préféré donc je rejoins rapidement les voitures à leur emplacement définitif. A commencer par cette extraordinaire Jaguar XK 120 par Pinin Farina

       

       

garée aux cotés d'une rarissime Corvette carrossée par Scaglietti.

Les plus anciennes sont déjà en nombre.

       

La superbe 212 Export est en place, en plein dans le contre-jour.

       

       

Paul Russell arrive au volant de la 335 S. Cette journée s'annonce déjà très bien!

       

       

Alors que le voile brumeux se lève, le soleil commence à faire dorer les carrosseries.

       

Sauf celles de mes classes préférées qui sont comme d'habitude installées à l'ombre.

       

       

Il est passé 8h00, les arrivées s'enchainent désormais trop vite pour que je puisse les suivre individuellement.

       

       

Je limite les dégâts comme je peux.

       

       

       

       

       

Tout en gardant une oreille attentive à l'arrivée des plus gros morceaux.

       

Les Formule 1 s'installent progressivement.

       

       

       

       

       

       

Je me concentre sur les incontournables bien sûr

       

       

       

       

La 750 Monza est l'une des nombreuses inédites de ce weekend

       

       

       

       

Je me fais violence pour me rapprocher des avant-guerre.

        

Pour certaines c'est facile et je sais exactement ce que j'ai sous les yeux: des mythes.

       

Comme ici avec la plus belle de toutes les Bugatti

       

       

Ou ce duo d'Alfa Romeo

Pour d'autres, je n'en ai pas encore la moindre idée

       

       

       

De fait, j'essaie de m'intéresser à tout, comme cette étonnante Cadillac

       

       

La Delage

       

La 507

       

BMW Classic a garé la sienne non loin de là d'ailleurs.

Cette Aston Martin est étrangement familière non?

       

       

       

Valentino Balboni raconte des histoires de Miura, pour changer

alors que je me rapproche de la voiture la moins pratique au monde, la Stratos HF Zero.

       

Le cockpit s'ouvre grâce à un bouton dissimulé sous le logo Lancia, après quoi il faut marcher sur la partie en caoutchouc qui sert de 'paillasson' pour s'installer dans l'habitacle et tirer la colonne de direction vers soi.

       

       

       

La Scat a commencé sa vie en Sicile, à une époque où il valait mieux sortir armé pour éviter de se faire dévaliser, ce qui explique les étuis sur le marchepieds.

Une 540 K

       

Je sais que certains ont trouvé cette Abarth un peu trop neuve mais elle en jette quand même.

       

       

Derniers moments de calme autour des F1

       

On se croirait vraiment dans une pitlane par moments.

       

       

L'Astura et l'Atalante sont étonnamment délaissées.

       

       

       

       

       

Le moment fort de la journée: quand les juges viennent évaluer les Formule 1, ce qui passe forcément par le lancement des moteurs. Les murs du palais n'ont jamais dû trembler autant en 450 ans d'existence.

La 33 Stradale dévoile elle aussi ses entrailles

       

alors que la 212 a enlevé le haut.

       

La DB3 envoie des messages d'amour subliminaux à qui sait les voir.

J'aime beaucoup cette 8V, toutes les 8V en fait.

Je suis tellement blasé que je n'ai presque pas fait de photos de la GTO

       

Par contre, que de spectaculaires duos!

       

Au bout d'un moment, je me dis qu'il faut quand même que je traverse pour aller voir les concepts, l'un d'entre eux m'intéressant tout particulièrement. Voici la très belle Mazda Vision Coupé, déjà lauréate du « Plus beau Concept Car de l’Année » lors du 33e festival Automobile International de Paris en janvier. Issue de la tradition du design KODO, le style mise sur la simplicité et la dignité, aboutissant à ce dessin élégant et épuré.

       

       

Ici la GFG - Style Sibylla, produite par le studio de Giorgietto et Fabrizio Giugiaro, dont l'accessibilité et le confort semblent plus étudiés que le style proprement dit.

       

       

Le Genesis Concept Essentia est issu du centre de style de Hyundai qui propose un design athlétique très original. Je n'ai pas eu le coup de foudre mais il faut lui reconnaitre le mérite de ne ressembler à rien de connu.

       

       



Et voici donc la SP38, une carrosserie sur mesure créée pour un client sur base de 488. A moins que ce ne soit une cliente, au vu du petit nom de la voiture: Deborah. En réalité l'identité de la propriétaire est un secret de polichinelle pour les gens que ça intéresse et le fait que la voiture soit présentée sous la bannière de Loris Kessel Auto SA indique qu'elle devrait résider en Suisse.

       

Le Centre de Style Ferrari revendique les influences de la F40 et de la 308 (pour le couvre moteur et pour le pare-choc avant) mais c'est surtout la J50 qui saute aux yeux quand on regarde l'avant.

       

               

L'arrière est totalement original en revanche, avec une habile utilisation des feux de la 812 Superfast (un ami me confiait qu'homologuer des nouveaux feux coûtait plusieurs centaines de milliers d'euros).

       

La mécanique est strictement d'origine, ce qui semble logique avec un moteur V8 qui rafle régulièrement des prix internationaux.

       

       

L'intérieur est Tailor Made mais sans ostentation.

       

Pour vous donner mon avis, c'est l'une de mes SP préférées. J'aimais déjà beaucoup la J50 (une série limitée à dix exemplaires réservée au Japon, pour mémoire), et je trouve celle ci superbe. L'avant est réussi, l'arrière est particulièrement audacieux et le flanc reste harmonieux, sans grande échancrure. Je pense que ce que j'aime vraiment est que le style semble avoir gardé la priorité sur l'aérodynamique. Je n'ai semble-t-il pas été le seul à y être sensible puisque la SP38 remporte la classe des concept-cars et prototypes, même si en élégance pure, la Mazda me semble mériter davantage.

       

       

Rolls-Royce fait la démonstration de son savoir faire avec les trois modèles de sa gamme

       



Ainsi qu'une version bespoke aux spécifications uniques. Pas trace du Cullinan dont l'exclusivité européenne a été réservée au Concours d'Elégance Suisse. Le modèle qui circulait en burka a manifestement participé à un shooting à Villa Erba et a forcément fait l'objet d'une présentation privée mais nous ne le verrons pas. Du coup, on en parlera plus en détail dans le reportage consacré au prochain CES.

       

       

       

BMW a apporté un seul concept en démonstration, la M8 Gran Coupé mais elle est terriblement mal mise en valeur (un peu comme à Genève tiens)

       

C'est l'heure de la parade. C'est Simon Kidston qui officie de nouveau en tant que speaker. Max Girardo n'aura donc fait qu'une pige l'année dernière. Je passe devant le jury et photographie certains trophées.

       

En tête, un nouveau concept BMW à deux roues,

       

devant quelques motos anciennes qui participent au concours d'élégance qui se tient à Villa Erba.

       

Comme l'an dernier, je me suis positionné au bout de l'allée en gravier, à coté du marchand de journaux.

Je vais prendre les voitures pleine face avec le 70-200 sur le 6D et légèrement de 3/4 avec le 17-40 sur le 60D. Il faut jongler un peu mais ça va.

       

C'est parti pour la Classe A: "The Titans: Dirt, Dust and Danger" (les Titans: saleté, poussière et danger)

On commence avec cette Isotta Fraschini Fenc de 1909, châssis 6023, engagée par Juanita Doerksen & Harold Peters. Il s'agit d'une version routière dérivée des Tipo FE construites pour le Grand Prix des Voiturettes de Dieppe en 1908. Leur technologie était si avancée qu'elle fut longtemps attribuée à Ettore Bugatti, avant d'être finalement restituée à Giuseppe Stefanini. Il est revanche possible que Bugatti se soit inspirée des Isotta pour créer ses Type 10 et Type 13. Celle ci, l'une des très rares survivantes, a été retrouvée en très mauvais état dans une casse et reconstruite autour des pièces sauvables.

       

Une Bugatti Type 35 de 1925, châssis 4830, engagée par Philippe Cornet de Ways-Ruart, dont la livrée laisse penser à un historique Suisse.

       

Hollywood se manifeste également dans la tenue des modèles qui marchent très loin derrière les voitures.

       

Une Alfa Romeo 6C 1750 Gran Sport de 1930, carrossée par Zagato, châssis 8513066, engagée par Luca Bergamaschi

       

L'Alfa Romeo 8C 2300 Monza 1933 par Zagato de Roderick Jack, châssis 2211130, prend la deuxième place de classe. Il s'agit d'une voiture assez célèbre puisqu'un ouvrage entier lui est consacré. Il faut dire qu'elle semble avoir eu une succession de propriétaires pilotes hauts en couleurs dont John Cobb, un chasseur de records de vitesse et Luis Fontes, vainqueur au Mans en 1935

       

Et c'est la Bugatti Type 59 1934, châssis 59124, de Marc Newson qui remporte sa classe. Cette voiture fait partie des quatre "Type 59 anglaises", des voitures d'usine vendues à un quatuor de gentlemen drivers britanniques. Avant cela, il s'agissait probablement de la voiture confiée à René Dreyfus.

       

Mesdemoiselles.

               

La Triumph Dolomite 8 1934 de Jonathan Turner, châssis DMH1 est une voiture singulière, grandement inspirée par l'Alfa Romeo 8C Monza. En tout seulement trois châssis de Dolomite Straight 8 furent construits et celui ci est le seul a avoir été complété chez Triumph. Il fut engagé par Donald Healey au Rallye de Monte Carlo 1935 mais quand le pilote essaya de battre un train pour franchir un passage au niveau (au Danemark, ne me demandez pas...), il perdit, sans dommage corporels heureusement. Détruite, DMH1 fut reconstruite sur le troisième châssis (qui fut refrappé) et termina huitième de l'édition 1936 du Rallye.

       

Une Lagonda LG45 Rapide 1936 par Fox & Nicholl, appartenant à Andreas Pohl, châssis 12111. Cette voiture a un beau palmarès de course au Royaume Uni et a même couru au Mans en 1937.

       

La classe B est pour moi la moins intéressante, mais elle passionnera sans doute les amateurs de Gatsby le Magnifique: "From Manhattan to Mayfair: The Golden Age of Motoring Opulence" (de Manhattan à Mayfair, l'âge d'or de l'opulence automobile). Et je dois reconnaitre que les participantes ont du style.

Voici d'abord la Bentley 4 1/2 Litre de 1928 par Jarvis & Sons de Maurits van Son, châssis NT3145, qui est récompensée du Trofeo Automobile Club di Como pour être venue par la route du point le plus éloigné.

       

L'Isotta Fraschini Tipo 8A SS 1929 par Castagna, engagée par Mikhail Opengeym, de Russie, châssis 1535.

       

La Rolls-Royce Phantom Brougham de Ville 1929 par Brewster & Co, engagée par un français, Frédéric Leroux, châssis S390LR. Elle remporte la classe, bien qu'elle doive être poussée pour quitter les lieux. Elle reçoit également le Trofeo Rolls-Royce qui récompense la Rolls-Royce la plus élégante.

       

La Cadillac V16 Roadster de 1930 par Fleetwood, châssis 702092, engagée par Frederick Lax prend la deuxième place. Elle reçoit aussi le Trofeo BMW Group Classic de la restauration la plus sensible.

       

Une Packard Standard Eight de 1932, propriété de Mark van Leeuwen, châssis 521-37

       

Cette Rolls-Royce Phantom II de 1933, châssis 289AJS, vient de la Collection Lehrman, des USA.

       

Enfin, la Mercedes-Benz 540 K Cabriolet A 1937 de Ioan Tiriac, un habitué du concours, châssis 169363.

       

La Classe C fait la transition entre l'opulence et la sportivité: "Shaped by the Wind: Grandes Routières of the Art Deco Era" (façonnées par le vent, Grandes Routières de l'ère Art Déco)

Sans grande surprise, c'est la Lancia Astura Serie III par Pinin Farina, châssis 33-3287, engagée par Anthony MacLean, qui remporte le premier prix, ainsi que le Trofeo FIVA de la voiture d'avant guerre la mieux préservée. C'est le troisième Concours d'Elégance où je croise cette voiture, après Coppet et Chantilly.

       

Une magnifique Bugatti 57 Atalante de 1937, châssis 57598, présentée par Albert Wetz

       

Une Bentley 4 1/2 Litre de 1937, par Erdmann & Rossi, châssis B-58-LS, engagée par Saulius Karosas

       

Une autre Bugatti 57 de 1938, habillée d'une carrosserie cabriolet 2/3 places unique par D'Ieteren, châssis 57589, propriété de Audrey & Martin Gruss, se classe deuxième.

       

La classe D s'intitule "New World, New Ideas: The Story of the GT" (Nouveau monde, nouvelles idées, l'histoire de la GT)

Voici d'abord une Bentley Mk VI Lightweight de 1949, châssis B359EW, habillée chez H. J. Mulliner et engagée par Fred Kriz. Elle repart avec le Trofeo Julius Baer de la voiture montrant le plus exceptionnel savoir faire.

       

Puis la sublime Ferrari 212 Export Vignale de 1951, châssis 0110E, qui signe le grand retour de Peter Kalikow et prend la deuxième place dans la classe. Seuls deux cabriolets 212 Export ont été carrossés chez Vignale. Ce n'est qu'en 2016 que celui ci a rejoint l'écurie Kalikow et elle a reçu le traitement "restauration à neuf" typique du collectionneur américain. En 2017, elle a remporté le Best of Show au Cavallino Classic.

       

Voici la Fiat 8V Vignale 1953 de Manfred Schweri, châssis 106*000046.

       

Cette magnifique Jaguar XK 120 SE Pinin Farina, châssis S675360 de 1954, présentée par Peter Neumark, est un exemplaire unique. On en sait à priori assez peu sur elle, si ce n'est qu'elle aurait été commissionnée par l'inévitable Max Hoffman et présentée au Salon de Genève 1955. La restauration entreprise par Classic Motor Cars aurait duré plus de 6700 heures et nécessité une très haute technologie, du scan numérique à l'impression 3D. Elle a révélé que Pinin Farina avait travaillé à partir d'une carrosserie originale de XK 120.

       

La Chevrolet Corvette Scaglietti 1959 d'Abraham Joseph a une histoire passionnante et malheureusement assez typique. Tout commença avec un riche industriel texan, gentleman driver à ses heures, Gary Laughlin. Il venait de casser le moteur de sa Ferrari Monza et savait que la réparation allait lui coûter très cher. Il alla voir l'un de ses amis appelé Carroll Shelby et ils décidèrent d'allier la robustesse des moteurs américains avec la légèreté des carrosseries en aluminium européennes. Laughlin, qui possédait quelques concessions Chevrolet fut mis en rapport avec Sergio Scaglietti par le journaliste Peter Coltrin. Trois châssis Corvette nus furent discrètement exfiltrés de l'usine de St Louis et envoyés chez Scaglietti. Le carrossier produisait alors les 250 Tour de France et adapta les lignes au gabarit supérieur de la Corvette, tout en gardant la grille avant caractéristique pour amadouer les cadres de General Motors. Le projet était mené dans le plus grand secret car Enzo Ferrari aurait sans doute été fort mécontent d'apprendre que son carrossier travaillait pour la concurrence. Une première voiture fut terminée fin 1960 mais à ce moment là, Carroll Shelby avait déjà été sommé d'abandonner le projet, General Motors voyant d'un mauvais œil que ses voitures officielles puissent être battues par une "concurrence interne". Les deux autres exemplaires furent assemblés et l'aventure s'arrêta là mais Shelby ne renonça pas à son idée de marier la puissance américaine et l'élégance européenne, comme vous le savez.

       

La Ferrari 250 GT Passo Corto de David McNeil, châssis 2243GT, une version acier, s'adjuge la victoire de classe.

       

Voici l'Alfa Romeo 33/2 Stradale 1968 d'Albert Spiess, châssis 75033.110, qui reçoit le Trofeo ASI de la voiture d'après guerre la mieux préservée. Malgré sa dénomination Stradale, elle a été construite selon les spécifications Competizione. Elle fut vendue à un distributeur romain puis à un client qui ne la garda qu'un an avant de la revendre à un concessionnaire de la marque. Celui ci la conserva dans son showroom pendant presque 20 ans. Après ça, elle n'a eu que deux autres propriétaires, ce qui explique son remarquable état de préservation. La rumeur veut que M Spiess détiendrait trois exemplaires de Stradale!

       

De plus en plus sauvages, avec la classe E: "Speed Meets Style: The Flowering of the Sports and the Racing Car" (la rencontre du style et de la vitesse: l'éclosion des voitures de sport et de course).

Cette Jaguar Type C 1952, châssis XKC 015, engagée par Hans-Martin Schneeberger, a appartenu à Masten Gregory qui remporta au moins trois victoires à son volant.

       

La Ferrari 750 Monza 1955, châssis 0496M, de José M. Fernandez a un pédigrée prestigieux puisqu'elle fut livrée neuve au Marquis Alfonso de Portago, qui l'engagea immédiatement aux 12 Heures de Sebring. Les photos d'époque attestent qu'elle portait alors les flammes sur le capot, pour "intimider" les adversaires. La course se termina par un abandon mais De Portago se rattrapa ensuite avec deux victoires et une deuxième place à Nassau et une deuxième place à Caracas.

       

Une Aston Martin DB3S de 1955, présentée par Stephan Hofmann, châssis DB3S/115, une des vingt voitures "client", destinée comme sa livrée l'indique aux Etats Unis.

       

La Ferrari 335 Sport 1958 d'Andreas Mohringer, châssis 0764. Elle remporte le Best Of Show 2018 (en plus de sa classe bien sûr). Il s'agit de la quatrième et dernière 335 S produite. Elle fut construite spécialement pour courir aux Etats Unis, avec une carrosserie à pontons fendus dans le style des 250 TR. Le moteur 4 litres développait près de 400 chevaux. Importée par Luigi Chinetti, elle fut vendue à un pilote privé qui l'exposa au Salon de New York 1959 avant de l'emmener courir, remportant deux victoires dans des courses mineures. En 1960, elle revint à Maranello pour remettre en état le moteur cassé et ce n'est que 20 ans plus tard que châssis et moteur furent de nouveau réunifiés. Confiée à Paul Russell pour une restauration complète qui dura trois ans, il semble que beaucoup d'énergie ait été déployée pour retrouver la couleur originale exacte. 

       

La Ferrari 250 GTO de Chris & Ann Cox, châssis 3445GT, qui reçoit sans grande surprise le Trofeo Vranken Pommery récompensant la voiture la plus iconique. Elle prouve qu'elle a bien l'échappement le plus libéré des GTO que je connaisse.

       

Une Porsche Carrera GTS de 1964, châssis 904-041, présentée par Klaus-Otto Räker, deuxième de classe. Cette voiture a participé deux fois aux 24 Heures du Mans, terminant cinquième de sa classe en 64. En 1968, elle a connu une belle carrière en course de côte, avec une victoire et quatre podiums. Tout ça entre les mains de propriétaires français.

       

Et pour clôturer cette classe énorme, l'Abarth 2000 Sport SE de 1969, châssis 0036, engagée par Marco Confidati

       

La classe F est bizarrement baptisée "80 Years of Automotive Archeology" (80 ans d'archéologie automobile) alors qu'elle débute par la SCAT 25/35 HP de Corrado Lopresto, châssis 1550, construite en 1913. Le collectionneur italien remporte sa classe et un Trophée du véhicule le mieux préservé qui semble avoir été créé sur mesure pour lui. Si j'ai bien écouté, cette voiture est restée près d'un siècle dans la même famille, amoureusement préservée, la carrosserie étant couverte de vaseline (?) pour éviter qu'elle ne s'abime et elle se présente donc dans un état strictement d'origine.

       

Une deuxième Fiat 8V, habillée chez Fiat Carrozzerie Speciali, châssis 106*000100, présentée par Jan De Reu.

       

Cette petite Fiat 500 Spiaggia de 1958, carrossée par Boano et engagée par Luca Bertolero est très spéciale. Pas seulement parce que deux exemplaires ont été construits mais car elle a appartenu à Gianni Agnelli qui s'en servait pour les trajets entre son yacht et sa propriété de Villefranche sur Mer, jusqu'en 1973. Autant dire que de nombreuses célébrités ont du s'asseoir sur l'étroite banquette arrière

       

Je crois que j'ai trouvé mon accompagnatrice préférée, celle qui a un peu de chair sur les os.

       

L'Iso Grifo GL 350 1967 d'Ulf Klenk, châssis 750169

       

La Lamborghini Miura P 400 SV d'Andrej Friedman, châssis 4904, Best of Show au premier Concours d'Elégance Suisse, se contente ici de la seconde place de classe. Là aussi, il n'est pas très étonnant qu'elle reparte avec le Trofeo Auto & Design du design le plus excitant.

       

La classe titre: "Hollywood On The Lake: Stars of the Silver Screen" (Hollywood sur le lac, les stars du grand écran)

On commence par cette Delage D8-120 de 1939, châssis 51760, par Chapron, engagée par Peter Mullin. Ce voiture fut confisquée par un Général français collaborateur du régime de Vichy qui la fit expédier en Californie avant de se voir refuser un visa pour lui même. Il prit donc la direction de l'Argentine après avoir vendu la Delage aux studios RKO. Elle fit ensuite des apparitions dans plusieurs films, comme "Un américain à Paris" où elle transporte Gene Kelly et Nina Foch (alors peinte en vert).

       

Cette Cadillac Series 62 de 1953, carrossée par Ghia, et présentée par le Petersen Automotive Museum a été achetée par le Prince Aly Khan pour Rita Hayworth, lors d'une tentative pour éviter le divorce. Celui ci eut tout de même lieu mais l'actrice conserva la voiture (et la garde de leur fille, mais c'est une autre histoire). Seuls deux exemplaires furent construits, avec quelques variations. Celle ci a été restaurée après être entrée dans la collection Petersen et a remporté de nombreux prix. Apparemment la voiture était blanche du temps où elle appartenait à la star mais le fait qu'aucune photo d'époque ne semble exister (en tout cas sur internet) en dit long sur l'évolution du star-system des années 50 à nos jours.

       

Quant à cette BMW 507 de 1958, châssis 70192, propriété de Christian Traber, elle a appartenu à Ursula Andress. En fait, mais c'est plus compliqué à confirmer, elle aurait été offerte à l'actrice par Elvis Presley à la fin du tournage du film "Fun in Acapulco". A un moment donné, elle reçut un V8 Ford et des pare-chocs particuliers qui sont toujours en place (contrairement au moteur).

       

Cette Aston Martin DB5, apportée par Harry Yeaggy, est très spéciale. La première apparition d'une Aston Martin aux mains de James Bond eut lieu dans Goldfinger, le troisième film de la saga. En tout ce sont deux véhicules qui furent utilisés: le châssis DP/216/1, la première DB5 jamais produite, équipée de tous les gadgets et utilisée pour les gros plans. Le châssis 1486/R ici présent, sans gadgets, fut quant à lui utilisé pour les plans larges et les poursuites. Deux autres châssis, 2008/R et 2017/R, furent par la suite équipés des gadgets et utilisées à des fins promotionnelles. Les deux voitures initiales furent de nouveau utilisées pour le film Opération Tonnerre en 1965. Après les tournages, DP/216/1 fut remise en état d'origine et vendue à un client en 1968. Le client s'empressa de faire réinstaller les gadgets et elle fut revendue avant de disparaitre mystérieusement d'un hangar d'aéroport une nuit de juin 1997. Plus personne n'a jamais entendu parler d'elle et il est donc probable, comme le souligne Simon Kidston, qu'elle dorme aujourd'hui au fond d'un bayou de Floride. Ce qui fait de 1486/R la dernière survivante des voitures ayant participé aux tournages de Goldfinger et Opération Tonnerre, et lancé le partenariat mythique entre 007 et Aston Martin. Elle se présente aujourd'hui avec tous les gadgets du film, installés à l'usine après les tournages pour satisfaire encore une fois les besoins promotionnels. Le châssis 1486/R est donc une Aston Martin très importante, qui a été vendue par RM en 2010 à son propriétaire actuel pour 4.6 millions de dollars. Elle prend la deuxième place de sa classe.

       

La Ferrari 500 Superfast de Bénédicte & Véronique Laureys, châssis 6679SF, a appartenu à l'acteur Peter Sellers. Apparemment elle n'aurait jamais été restaurée, juste repeinte deux fois dont une pour retrouver cette teinte Nocciola caractéristique.

       

Voici l'une des grandes attractions du concours, la Lancia Stratos Zero de Phillip Sarofim, dont une réplique fit une apparition en 1988 dans le film Moonwalker de Michael Jackson. Aujourd'hui, elle s'adjuge sa classe et demain, elle remportera le Trofeo BMW Group Ragazzi décerné par le vote des enfants à Villa Erba. Le début des années 70 a été assez exceptionnel en terme de concept cars, avec la Marzal, la Carabo, la P5 ou encore la Modulo (que j'espère voir ici dans les années qui viennent, alors qu'elle vient de rouler sans assistance pour la toute première fois de sa vie). Au salon de Turin 1970, Bertone présenta la Stratos HF. L'objectif était plus ou moins de voir la hauteur minimale qu'une voiture pouvait atteindre et la Zero culmine à 84 centimètres du sol. La voiture a été assemblée autour de pièces Lancia, dont le moteur V4 de la Fulvia HF. La faible hauteur de la voiture fut utile quand Nuccio Bertone se vit refuser l'accès au département compétition de Lancia. Il passa alors simplement sous la barrière, faisant ainsi une entrée des plus remarquées et obtenant le droit de discuter de ce qui allait devenir plus tard la véritable Lancia Stratos.

       

Et donc la dernière classe, aussi audacieuse qu'inédite: "When Sex Was Safe and Racing Was Dangerous: Formula One!" (quand le sexe était sûr et la course dangereuse: Formule 1!). Kidston fait monter la sauce en annonçant que vu le caractère très agressif des voitures qui vont défiler, des lunettes de protection et des bouchons d'oreilles vont être distribués à qui le demande. Précaution largement superflue évidemment mais qui contribue à faire monter l'ambiance, d'autant que ce sont des grid girls très court vêtues qui s'occupent de la distribution. J'adore quand les gardiens de la tradition se permettent ce genre de transgression.

       

< Musique du film Armageddon >

On commence fort avec cette Maserati 250F de 1954, châssis 2523, présentée par Guillermo Fierro-Eléta, qui prend la deuxième place. Pas moins de trois voitures ayant porté ce numéro de châssis, je ne commenterai pas plus avant.

   

Une Porsche 718/2 de 1960, présentée par Oliver Schmidt, châssis 718/2-02. C'est peu de dire que Porsche est arrivé en F1 par accident. A l'époque la règlementation était assez souple et il suffisait quasiment d'enlever un siège et une roue de secours à une 550 ou une 718 RSK pour s'aligner en Formule 2. C'est d'ailleurs ce qui se passa à Reims en 1958 avec Jean Behra. L'année suivante cinq RSK furent converties en vraies monoplaces et les victoires arrivèrent dès l'année suivante, avec Stirling Moss. En 1961, la F1 adopta le moteur 1.5 litres des F2 et Porsche se retrouva de fait avec une F1 compétitive, qui permit à Dan Gurney de prendre trois deuxièmes places et la quatrième place du championnat.

Une Lotus 21 de 1961, engagée par Federico Buratti, châssis 937. En 1961, la Lotus 21 fut la première Lotus d'usine à remporter une course de F1

Une B.R.M. P180 de 1972, présentée par Egon Zweimüller, châssis P180/02 ex-Beltoise. Seuls deux châssis P180 ont été construits, celui-ci signant la toute dernière victoire de BRM en Formule 1 à Brands Hatch (lors d'une course hors championnat, le John Player Challenge Trophy). En 1972, les BRM furent également les premières F1 à arborer la fameuse livrée rouge et blanche de Marlboro. Une chance que l'on soit en Italie et que le nom du sponsor n'ait pas besoin d'être masqué.

Une Tyrrell P34 de 1977, châssis P34/5, engagée et pilotée par Pier Luigi Martini. Il s'agit du premier châssis construit pour la saison 1977, confié à Ronnie Peterson. Le suédois parvint à hisser sa voiture sur le podium en Belgique.

       

La voiture s'est arrêtée devant moi, son porte à faux avant l'empêchant de gravir la légère côte nécessaire pour poursuivre son chemin.

Une Alfa Romeo 182, châssis 182/04, présentée par Aldo Baroli. La 182 a connu de très nombreux abandons durant la saison 1982, mais a tout de même prouvé son potentiel en réalisant une pole position à Long Beach et en prenant la troisième place à Monaco. C'est la seule F1 qui a choisi d'être poussée plutôt que démarrée.

Et enfin cette incroyable McLaren MP4/2B, engagée au nom de Gerhard Berger, qui n'est pas présent aujourd'hui. Ce châssis, MP4/2B-5 a été utilisé par Alain Prost en 1985, remportant trois victoires et contribuant à son premier titre mondial (et à celui des constructeurs).  Elle accroche une nouvelle victoire, plus inattendue, à son palmarès. Il faut noter que la voiture a été redémarrée devant le jury et a quitté les lieux par ses propres moyens!

       

A 17h45, la dernière voiture est donc enfin passée. J'ai horriblement mal au coccyx au moment de me relever après trois heures assis dans les graviers. Pourtant, il faut y aller: c'est l'heure du rush pour les photographes qui se précipitent tous devant le jury pour le premier grand prix du concours.

Et la gagnante de la Coppa D'Oro, par décision du public, est... l'Alfa Romeo 33 Stradale!!!

       

La cohue est indescriptible au moment de la remise de la coupe.

       

Comme c'est la tradition, je monte ensuite vers l'allée d'arbres mais arrivé là bas, je suis tout seul et la voiture me passe devant sans s'arrêter. La tradition a du changer sans que j'en sois informé.

Oh bon, je redescends donc et arrive au moment où les héros du jour vont s'extraire de la star du jour.

Puis ce sont les photos avec les trophées.

       

Peu de voitures sont revenues se garer ici mais il y a quand même de la qualité.

       

       

Ca sent la fin de journée mais il faut dire que la parade a été interminable.

       

Ne restent plus que les fanatiques, une dizaine de photographes.

Pendant deux jours, nous nous sommes demandé s'il serait possible de faire une très belle image de la 33 Stradale. On s'en approche.

Et la voilà!! Une satisfaction et un soulagement.

La Miura se positionne pour un shooting dans la tradition du vendredi. Dommage que ce soit de l'histoire ancienne désormais.

       

Puis elle s'en va.

       

Il est facile d'oublier de photographier l'arrière des voitures et celui de la Stradale est encore plus impressionnant que son avant. Je me mets donc en "backstage" quelques minutes.

       

Puis c'est le départ.

Nous prenons nous aussi le chemin de la sortie, en passant devant les concept cars restants.

       

La Genesis manœuvre.

Un coup d'œil sur les voitures promotionnelles

       

et la Lotus passe devant nous

pour aller s'arrêter un peu plus loin.

       

Pendant le repas du soir, l'un des convives mentionne qu'il a vu une RUF jaune sur le parking de l'hôtel voisin. Je me précipite. C'est bien elle! La CTR 2017 que j'ai élue coup de cœur du Salon de Genève 2017 et que j'ai loupée dans la rue cette année. Je suis très heureux de la voir ailleurs que sur un stand. Elle est sublime et parachève parfaitement cette journée incroyable.

       

       

Le Concorso d'Eleganza Villa d'Este a toujours fait la part belle à la sportivité (tout comme Chantilly d'ailleurs) et si certains peuvent se demander où est l'élégance dans les lignes optimisées d'une voiture de course, j'avoue que cela me convient parfaitement. J'ai souvent déclaré ma flamme pour ces voitures construites dans un seul et unique but, aller plus vite que les autres et j'applaudis donc l'audace qui a conduit le comité de sélection à convoquer des Formule 1 sur les graviers du vénérable hôtel. Et plus encore les propriétaires et mécaniciens qui ont décidé de ne pas se contenter de pousser les voitures. Elles sont faites pour rugir. La dernière étape de ce weekend est souvent ma préférée: les pelouses de la Villa Erba se prêtent souvent mieux aux photos que celle d'Este et contrairement à l'année dernière, nous avons reçu quelques assurances pour une entrée anticipée. Encore quelques belles images à venir donc.

Pour conclure, j'aimerais dédier cette page à Philippe, un très grand passionné qui était venu plusieurs fois au Concorso et qui est parti bien trop tôt. Hélas il n'y a aucune des McLaren si chères à son cœur dans ce reportage mais toutes mes pensées vont à sa famille.

Libre à vous de quitter cette page par ici si vous avez terminé la consultation du site. A bientôt


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