La Ferrari 250 Testa Rossa fait partie des
légendes de la course automobile. On comprend facilement pourquoi quand on sait
qu'elle a permit à Ferrari de remporter quatre titres de Champion du Monde des
Constructeurs de Voitures de Sport, et qu'elle a remporté quatre fois Le Mans,
inscrivant la dernière victoire d'une voiture à moteur avant dans la Sarthe.
D'une certaine façon, la TR est l'héritière de l'horrible drame du Mans 1955. Il
était évident que la FIA prendrait des mesures pour tenter de limiter la
puissance des voitures et Ferrari commença à développer son nouveau modèle dès
1957. Malgré les beaux succès remportés par les quatre cylindres, Ferrari savait
qu'il faudrait davantage pour lutter avec Aston Martin, Jaguar et Maserati. Il
était temps de ramener le V12 sur le devant de la scène. Quand la FIA annonça
effectivement la limitation des cylindrées à trois litres, Ferrari était prêt: son
moteur 250 comptait déjà de nombreux succès.
Le moteur fut installé dans un châssis similaire à celui des 500 TRC et tout
comme sur les TRC, les cache-soupapes furent peints en rouge. Cependant, au lieu
des initiales TR, le nouveau modèle reçut le nom complet et bientôt mythique de
Testa Rossa. Deux prototypes furent engagés dès 1957, avec des débuts
encourageants: dixième au Nürburgring pour 0666TR, abandon au Mans après avoir
occupé la deuxième place pour 0704TR et trois et quatre au Venezuela. La 250
Testa Rossa fut officiellement dévoilée en novembre.
Le dessin très original des premières Testa Rossa, avec leurs pontons fendus,
était dû à Scaglietti. Sergio Scaglietti expliqua qu'il s'était inspiré des
Formule 1 de l'époque, les fameuses Lancia Ferrari, et de leurs réservoirs
latéraux. La forme des ailes était censée faciliter le refroidissement des
freins. Pour ses débuts officiels, 0704TR (qui n'avait pas les pontons
fendus) remporta les 1000 kilomètres de Buenos Aires et les 12 Heures de Sebring
avec Phil Hill et Peter Collins. Ferrari se rendit rapidement à l'évidence:
l'iconique dessin à pontons fendus n'était pas assez stable à haute vitesse et
dut être abandonné.
En 1959, Scaglietti était bien occupé avec les commandes de 250 Berlinetta et
California. Le nouveau dessin des Testa Rossa fut confié à Pinin Farina et les
carrosseries à Fantuzzi qui venait de perdre le marché des Maserati. La TR59
abandonnait définitivement les pontons pour une carrosserie pleine plus
aérodynamique, s'allégeait d'une cinquantaine de kilos et recevait une boite
cinq vitesses et des freins à disque. La saison donna lieu à un duel épique avec
les Aston Martin DBR1, la marque anglaise emportant le titre pour deux points.
Dès décembre 58, 0726TR avait reçu une carrosserie plus conventionnelle et
remporta la Targa Florio. Et en juin, 0728TR, elle aussi avec la nouvelle
carrosserie, s'imposa au Mans.
En 1960, les 250 TR évoluèrent encore, avec un empattement raccourci, une
carrosserie plus basse et un pare-brise intégral pour respecter le nouveau
règlement. Gendebien et Frère remportèrent les 24 Heures et Ferrari son sixième
championnat en huit ans.
L'année 1961 vit de nouveau d'importants changements cosmétiques, sous la
houlette de Carlo Chiti, transfuge d'Alfa Romeo. Deux exemplaires furent
construits: le premier remporta Le Mans et Sebring, le second le suivant à
chaque fois sur le podium. Avec le soutien des châssis courts, Ferrari empocha un
nouveau titre.
En 1962, la FIA créa une catégorie Prototypes dont les moteurs pouvaient aller
jusqu'à quatre litres. La catégorie GT fut laissée à la 250 GTO et Ferrari
modifia la TR61 pour obtenir la 330 TRI/LM. Celle ci remporta une nouvelle fois
les 24 Heures du Mans, concluant la saga des Testa Rossa en même temps que celle
des moteurs avant.
En tout, vingt 250 TR à pontons fendus furent assemblées, prototypes compris. Deux TR/58 (sans compter 0704), cinq TR59 dont trois seront converties en TR59/60, deux TRI60, deux TR60 et une 330 TRI/LM.
0714TR fut la deuxième voiture client produite, livrée au Vénézuélien Piero Drogo en décembre 1957. Ils terminèrent quatrième au 1000 kilomètres de Buenos Aires et douzième au Grand Prix de Cuba. En 1959, elle fut vendue à un américain qui lui donna sa livrée noire. Avec trois propriétaires successifs, 0714TR participa à de très nombreuses courses jusqu'en 1964, et est sans doute l'une des Ferrari client les plus utilisées en compétition.
0716TR était une voiture client mais participa d'abord aux 1000 kilomètres de Buenos Aires pour l'usine, sans terminer. Elle fut ensuite vendue au Brésil où elle participa à quelques courses. En 1964, elle reçut une carrosserie spéciale Drogo qu'elle conserva jusqu'à la fin des années 70. A ce moment, la Carrozzeria Fantuzzi la rhabilla en TR.
0720TR fut importée aux Etats Unis via Luigi Chinetti et courut intensivement en SCCA, remportant de très nombreuses victoires de classe (au moins seize), et terminant septième aux 12 Heures de Sebring 1959. En 1964, le garage dans lequel elle était conservée brula, ne laissant que le châssis et quelques éléments de suspension.
0728TR est une TR58, sans pontons fendus. Elle a terminé troisième de la Targa Florio 58, cinquième des 1000 kilomètres du Nürburgring et remporta les 24 Heures du Mans la même année. Elle fut ensuite vendue à Pedro Rodriguez qui figura très bien à Nassau mais du abandonner à Sebring en 59. Elle continua a courir jusqu'en 1962, avec un V8 Chevrolet la dernière année. En 1982, elle entra dans la collection du Mas du Clos pour 30 ans.
0734TR n'a jamais mis les roues sur un circuit et appartient à Ralph Lauren
0738TR a été exportée au Brésil, remportant deux victoires au moins. En 1964, elle fut recarrossée par Drogo et continua à courir sporadiquement jusqu'en 1967. En 1989, une nouvelle carrosserie de TR fut installée par DK Engineering. En 1996, elle passa chez Carlos Monteverde qui infligea quelques chocs à une carrosserie qui n'était de toute façon pas authentique.
0748TR a été livrée en Autriche mais connut un accident mortel au Nürburgring. Elle fut reconstruite à Maranello pour Luigi Chinetti qui l'importa aux Etats Unis où elle connut quelques mésaventures: son moteur fut installé dans une Maserati Birdcage (2461) et de nombreuses modifications furent appliquées, jusqu'à sa restauration dans les années 90.
0758TR partit pour le Venezuela, remportant plusieurs courses locales. Durant les années 60, elle reçut plusieurs V8 américains et fut modifiée au point de ne plus avoir grand chose d'original. Bien sûr, elle fut restaurée par la suite.
0774TR est une TR59/60 d'usine. Elle a remporté les 1000 kilomètres de Buenos Aires et les 24 Heures du Mans en 1960.
0808 est une 330 TRI/LM, convertie depuis le châssis 0780TR rallongé spécialement pour participer aux 24 Heures du Mans 62, qu'elle remporta. Elle fut ensuite vendue à Pedro Rodriguez qui termina troisième à Sebring en1963, avant d'avoir un accident au Mans. La voiture fut alors réparée à l'usine et carrossée en coupé par Fantuzzi. En 1974, elle entra dans la collection de Pierre Bardinon qui la renvoya chez Fantuzzi pour lui faire retrouver un carrosserie dans le style de 1962.
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