Retour

En 1937, les frères Maserati avaient vendu leur compagnie à la famille Orsi, en s'engageant à continuer à travailler dans l'entreprise pendant dix ans. L'une de leur dernière contribution, dévoilée en 1946, fut un moteur six cylindres en ligne surnommé A6 (Alfieri, six cylindres). Le moteur fut rapidement adapté pour la compétition, voyant sa cylindrée passer de 1.5 litres à 2 litres. En 1947, il fut installé dans une voiture de sport, la 2000 Sport, rapidement surnommée A6GCS (G pour Ghisa, fer, le métal dans lequel était fabriqué le moteur, Corsa pour compétition et Sport). La carrosserie, créée par Medardo Fantuzzi, était de type Siluro (torpille) avec des ailes cycles. Elle disposait également d'un phare unique (monofaro) monté dans la calandre. Emmenées par Luigi Villoresi ou Alberto Ascari, ces voitures remportèrent de belles victoires malgré l'opposition d'une toute jeune marque: Ferrari. Seules 16 A6GCS furent construites entre 1947 et 1953, dont 5 après 1950.

Voici les châssis 2001 et 2002, deux voitures d'usine construites en 1947, pilotées respectivement par Ascari et Villoresi.

       

Le Championnat du Monde des voitures de Sport fut créé en 1953, comprenant des courses aussi mythiques que les Mille Miglia, la Carrera Panamericana, la Targa Florio, les 24 Heures du Mans ou les 12 Heures de Sebring. Bien sûr, les meilleurs pilotes et les plus grandes marques y participèrent. Fin 1952, Maserati avait développé deux A6GCS deuxième série, sur le châssis et le moteur de l'A6GCM (la version monoplace). Gioacchino Colombo dessina ensuite un tout nouveau châssis pour l'A6GCS/53, qui reçut une carrosserie légère en aluminium et un bloc six cylindres en ligne deux litres en aluminium également. Elle pesait environ 800 kilos pour 170 chevaux. Dès les Mille Miglia 53, la voiture remporta sa classe et termina sixième au général. Puis les A6GCS prirent les deuxième et troisième places aux 12 Heures de Pescara. Les victoires de classe s'enchainèrent ensuite régulièrement. En 1954, Musso termina troisième des Mille Miglia, neuf secondes seulement derrière la Ferrari de Marzotto, deuxième. Puis il prit la deuxième place de la Targa Florio, qu'il aurait sans doute gagnée s'il n'avait été victime d'une intoxication alimentaire. De Portago engagea même une A6GCS au Mans mais dut abandonner.

L'A6GCS/53 fut produite à 52 exemplaires entre 1953 et 1955, 48 en version spyder Fantuzzi et 4 en berlinette Pinin Farina.

2043 fut achetée par Luigi Musso, avec qui elle remporta le championnat d'Italie de voitures de sport, catégorie deux litres. Elle se montra moins performante lors des grandes courses, abandonnant aux Mille Milglia 53 et à Sebring 54, puis de nouveau aux Mille Miglia 56 et 57 avec un nouveau propriétaire. 

2053, une Maserati A6GCS par Fiandri, qui a notamment participé aux 12 Heures de Sebring en 1954. Son parcours est typique des voitures de sport de cette époque: une succession de pilotes amateurs enthousiastes l'ont modifiée pour pouvoir continuer à vivre leur passion, puis un passage dans le monde de la collection, retrouvant une forme d'intégrité. Elle a par exemple connu le "traditionnel" passage au V8 Chevrolet fin 1959. Elle dispose aujourd'hui du moteur de 2067.

       

2056 est l'un des quatre coupés Pinin Farina. Il appartient aujourd'hui à la Collection Panini.

       

       

2058 a été livrée aux Etats Unis, où elle a connu une carrière honnête en SCCA.

2059 est une autre A6 GCS Pinin Farina. Ce châssis est celui qui fut exposé au Salon de Paris en 1954, puis acheté par le Conte Magi Diligenti pour participer aux Mille Miglia 1955. Aujourd'hui la voiture est équipée d'un moteur de Formule 2 A6 GCM de 190 chevaux et serait la plus originale des quatre berlinettes construites.

       

2061 fut l'une des voitures d'usine. Elle a terminé septième du Grand Prix Supercortemaggiore à Monza en 1954 avant de recevoir une carrosserie dans le style des 200SI.

       

2062 a été livrée en Argentine.

2066 a couru deux fois les Mille Miglia sans succès mais a terminé douzième de la Targa Florio 55. Elle a été retrouvée dans les années 70 dans une casse au Venezuela, et a été reconstruite.

       

2071 était réputée détruite mais a fait sa réapparition dans les années 90 avec cette carrosserie inhabituelle signée Scaglietti.

       

2072 a participé au Mans en 1954.

2077 termina les Mille Miglia 1955 à la douzième place, troisième de classe

       

2078 fut une voiture d'usine qui a couru avec Luigi Musso. Son palmarès est impressionnant: quatrième au tour de Sicile (vainqueur de classe), troisième aux Mille Miglia, deuxième à la Targa Florio (vainqueur de classe), troisième au Grand Prix d'Imola; troisième au tour de Calabre et au Tourist Trophy de Dundrod (vainqueur de classe à chaque fois). Vendue ensuite en Argentine, elle continua a avoir de bons résultats.

2082 a participé au Mans en 1955. Elle aussi porte une carrosserie atypique.

       

2084 a été vendue à la Comtesse Maria Teresa De Filippis. Elle a échoué aux Mille Miglia 55, puis a connu de nombreux abandons avant de terminer deuxième au Grand prix de Naples 56.

       

2085 a terminé dixième à la Targa Florio 1955. On en sait pas grand chose d'autre d'elle.

       

2086 a été vendue à la Scuderia Centro Sud

2087 a fait deux tentatives infructueuses aux Mille Miglia en 1955 et 1956

       

2088 a couru en course de côte jusqu'en 1959 avant d'appartenir à Pierre Bardinon puis Fred Chandon.

2093 n'a rien à déclarer de particulier.

Il me reste juste à identifier celle ci qui a été exposée au Musée Mercedes dans le cadre de l'exposition sur les Mille Miglia.

La menace de la Ferrari 500 Mondial força Maserati à développer la remplaçante de l'A6GCS. Le moteur quatre cylindres utilisé en Formule 2 allait être utilisé pour la Tipo 52, ou 200S. Au début de 1955, le projet dut être accéléré et deux groupes travaillèrent en parallèle sur la 150S et la 200S, les deux châssis étant quasiment identiques. La 150S, avec son moteur de 1.5 litres en aluminium de 130 chevaux, était la plus petite voiture de sport de Maserati, idéale pour les pilotes privés. Certaines d'entre elles prirent même part à des courses internationales. L'un d'elles prit d'ailleurs la neuvième place au Mans en 1956.

La 150S fut produite à 25 exemplaires.

1651 a remporté les 500 kilomètres du Nürburgring 55 avec Jean Behra, en tant que voiture d'usine. Son style rappelle un peu la 300S.

1655 a été livrée aux Etats Unis où elle a un peu couru avant d'être saisie par le fisc.

De 1657 on sait bien peu de choses.

       

1659 a couru deux fois les 12 Heures de Sebring, en 56 et 57, sans terminer la course.

1664 a participé en 1956 aux Mille Miglia, aux 24 Heures du Mans et aux 1000 kilomètres de Paris, ne terminant que cette dernière course à la douzième place. C'est probablement l'une des Maserati les plus laides que j'aie jamais vu.

1667 aurait été une voiture d'usine.

Initialement, Maserati se concentra sur les 150S et les 300S, et une seule 200S fut assemblée en 1955. A Imola puis à la Targa Florio, la voiture ne fut pas très convaincante. En juin 1956, une 200S termina cependant deuxième de l'importante Supercortemaggiore à Monza. Alors que les cinq premiers exemplaires avaient été habillées par Fiandri, Fantuzzi prit la relève, et dessina une voiture avec un nez plus long et effilé. En 1957, un nouvelle appendice au règlement du championnat ajouta un certain nombre de contraintes, comme un pare-brise intégral avec essuie-glaces, deux portes et une roue de secours, ainsi qu'un toit souple. Les deux litres se conformant à ce règlement furent appelées 200SI pour Sport International. Hélas, les 200S ne se montrèrent pas aussi performantes que les 150S et les 300S mais restèrent un beau succès commercial.

La 200S a été produite à 28 exemplaires.

2405 est une voiture d'usine. Son coup d'éclat est d'avoir pris la deuxième place du Grand Prix Supercortemaggiore en 1956 avec Stirling Moss et Cesare Perdisa.

       

2406 a débuté comme voiture d'usine avant d'être convertie aux spécifications SI. Elle a ensuite participé au 12 Heures de Sebring 57 avec Lance Reventlow

2408 a été vendue au Brésil, comme en témoigne la livrée qu'elle a récemment récupéré.

2412 a été livrée aux Etats Unis, enchainant une impressionnante série d'abandons de mars 1957 à juin 1958, avant de prendre quelques places en milieu de peloton.

2413 n'a pas d'historique de course connu mais elle est dans son état d'origine.

       

2416 aurait été une voiture d'usine.

2419 est restée en Italie, abandonnant aux Mille Miglia 57.

2421 a été exportée aux Etats Unis

Sur 2423 il n'y a quasiment rien à signaler.

2427 a connu une belle carrière aux Etats Unis de 1957 à 1962, finissant souvent sur le podium de sa classe.

2428 aurait été une voiture d'usine.

Bien sûr, tous les pilotes réclament plus de puissance donc ce n'était qu'une question de temps avant que la 200S ne reçoive un moteur de 2.5 litres, devenant la 250S. Celle ci n'aurait été construite qu'à deux exemplaires en usine, mais plusieurs voitures furent converties en recevant le nouveau moteur.

2409 fut la première voiture à recevoir le 2.5 litres. Elle avait commencé sa vie comme une 150S avant d'être déjà convertie en 200S. Elle participa aux 1000 kilomètres de Buenos Aires avec Fangio.

2411 fut la deuxième et dernière 200S convertie en 250S par l'usine.

2431 fut la première 250S construite d'emblée comme une 250S, et elle fut livrée à Carroll Shelby Sportscars Inc.  Il est difficile de dire qui de 2431 ou 2432 participèrent à quelles courses mais à elles deux, les voitures se taillèrent un superbe palmarès, remportant trois victoires au général. En 1958, 2431 fut vendue et enchaina de nouveau les succès, s'adjugeant une nouvelle victoire et 7 deuxièmes places.

       

2432 fut la seconde et dernière 250S sortie d'usine, et partit elle aussi chez Shelby.

2501 serait un prototype équipé du moteur de la 250F sur un châssis d'A6GCM. A ce titre, elle serait la seule 200S équipée d'un 6 cylindres mais son histoire est sujette à caution. Le numéro de châssis n'aurait été assigné que dans les années 80, quand la voiture a été redécouverte.

La 300S reçut le plus gros moteur, le six cylindres en ligne porté à trois litres. Son baptême du feu eut lieu aux 12 Heures de Sebring 1955, avec d'impressionnantes troisième et quatrième places. Les Mille Miglia virent la fameuse victoire de Moss dans la Mercedes 300 SLR. La seule 300S engagée (parmi 29 autres Maserati dont onze ne prirent pas le départ) abandonna alors qu'elle était septième. Les deux 300S engagées au Mans abandonnèrent rapidement. Lors de la Targa Florio, les huit A6GCS engagées terminèrent la course alors que la 300S et les deux 200S se retirèrent. Pour 1956, la carrosserie fut modifiée et les freins renforcés. L'année commença bien avec la victoire de Moss à Buenos Aires. A Sebring, la 300S prit la cinquième place et le meilleur tour. Après un nouvel échec aux Mille Miglia, une 300S s'imposa au Nürburgring. Mais en Suède, les cinq Maserati abandonnèrent, laissant le titre à Ferrari. Pour 1957, Maserati continua à affiner la carrosserie de la 300S. A Buenos Aires, la 300S prit la deuxième place. Moss mena une nouvelle fois une 300S à la deuxième place à Sebring, derrière une 450S. La 300S se montra enfin digne aux Mille Miglia, prenant la quatrième place. Au Nürburgring, la trois litres sauva une fois de plus l'honneur de Maserati en prenant la cinquième place. Après une piètre performance au Mans, Maserati revint à trois points de Ferrari au championnat en Suède, grâce à la belle performance de la 450S et de la 300S, troisième. Je relaterai plus bas la catastrophe de Caracas, dont les 450S furent les malheureuses héroïnes, offrant le titre à Ferrari et conduisant Maserati à cesser ses activités sportives officielles.

La 300S fut produite à 26 exemplaires.

3051 fut livrée à Briggs Cunningham et Bill Lloyd la mena à des nombreuses victoires en SCCA (au minimum sept) entre 1955 et 1956. Après avoir changé de propriétaire, elle continua a très bien figurer, gagnant des courses jusqu'en 1959.

3053 fut elle aussi livrée à Cunningham pour Bill Spear. Elle aussi se tailla un beau palmarès, un peu inférieur à 3051 hormis une troisième place aux 12 Heures de Sebring en 55.

       

       

3054 fut la voiture d'usine de Musso, Behra, Fangio et Moss. Ses principaux faits d'armes furent une troisième place au Tour de Sicile 55, une deuxième au Grand Prix de Bari et une victoire au Grand Prix Supercortemaggiore à Monza. Elle remporta également la victoire à Caracas avec Fangio. En 56, elle remporta les 1000 kilomètres de Buenos Aires avec Moss puis continua à courir et à gagner jusqu'en 1962.

3057 a été livrée en Suisse et a remporté de nombreuses victoires avec Benoit Musy, dont le Grand Prix de Bari en 1956.

       

3058 est partie aux Etats Unis où elle s'est imposée plusieurs fois avec Masten Gregory. Lorsque Tony Parravano s'exila au Mexique pour fuir le fisc, il prit 3058 avec lui.

       

3059 courut pour l'usine et se tailla un palmarès respectable: avec Tarufi, elle finit deuxième du Tour de Sicile 56 puis première des 1000 kilomètres du Nürburgring et deuxième de nouveau à la Targa Florio . La même année Moss lui fit remporter le Grand Prix de Bari et le Grand Prix d'Australie.

3060 commença mal sa carrière, avec un accident à Sebring en 1956. Sur le chemin du retour, la remorque transportant l'épave fut heurtée par un camion, détruisant la quasi totalité de la voiture qui dut être reconstruite. Ensuite, elle connut au moins deux victoires en SCCA avec Carroll Shelby à son volant.

       

3061 participa aux 12 Heures de Sebring 55 pour le compte de l'usine et termina quatrième. L'année suivante, elle prit la cinquième place de la Targa Florio et la quatrième du tour de Calabre. Dans les années 80, elle fut achetée par Jean Guichet qui la conserva une quinzaine d'années.

3065 termina deuxième au Grand Prix du Portugal 57, sixième à Cuba et première à Rio de Janeiro avant de passer dans la Collection Schlumpf en 1964.

       

3072 était une voiture d'usine et prit la quatrième place des Mille Miglia en 1957. Elle fut une des victimes du désastre de Caracas.

3073 est une 300S vendue au Texas pour participer à des courses locales.

3082, l'avant dernière 300S, partit en Angola puis en Afrique du Sud.

En 1956, il était clair que la Maserati 300S et ses 245 chevaux ne pouvait plus lutter contre Ferrari et Jaguar. Il fut donc décidé de porter la cylindrée du 6 cylindres à 3.5 litres en attendant l'arrivée de la 450S. Les deux premiers châssis de la 350S, dénommés 3501 et 3502, firent l'objet d'une frénétique course contre la montre pour être prêts à temps pour les Mille Miglia. Finalement Piero Taruffi, initialement prévu, refusa la voiture et Stirling Moss accepta de relever le défi, bien que la voiture ne soit manifestement pas prête. Il abandonna sur une sortie de route.

3083 est une 300S qui a été pilotée par Stirling Moss en 1958 (victoire au Portugal) et Pedro Rodriguez en 1959.

Trois 350S furent produites.

3503 fut la troisième d'entre elles, et une voiture d'usine. Elle termina cinquième aux 1000 kilomètres de Buenos Aires en 1957 puis fut équipée d'un V12 de F1 250 F porté à 3.5 litres et développant 355 chevaux. Elle fut engagée aux Mille Miglia 1957 avec Hans Hermann mais ne termina pas l'épreuve. Récupérée en Argentine dans les années 90, elle fut restaurée / reconstruite entre 2007 et 2009.

Au début de l'année 1957, Maserati avait de grandes ambitions: conquérir le titre mondial en Formule 1 et en voitures de sport. En F1, l'ambition allait se concrétiser grâce à Fangio et la 250F Lightweight. En Sport, Alfieri avait développé le plus gros moteur de l'époque, un V8 de 4.5 litres, donnant naissance à la Tipo 54, ou 450S. En plus de Fangio, Maserati pouvait compter sur Moss, parti chez Vanwall en F1 mais dont le nouvel employeur ne courait pas en Sport. En fait, la conception de la 450S datait de 1954, avec pour objectif, bien sûr, de contrer Ferrari. Mais suite à l'accident du Mans en 1955, alors que le destin des voitures de sport était incertain, le développement du V8 avait été suspendu. C'est l'américain Tony Parravano qui le remit sur les rails en commandant un moteur capable de courir en Indycar. A l'été 56, le premier prototype passa en phase de test, avec le V8 de 400 chevaux sur un châssis de 350S. La voiture était rapide mais difficile à maitriser.

En janvier 1957, Moss et Fangio pilotèrent la 450S à Buenos Aires mais durent abandonner. Dès Sebring, Fangio et Behra imposèrent la 450S. Aux Mille Miglia, Moss dut abandonner au bout de dix kilomètres pour un bris de pédale de frein. La course du Nürburgring se solda elle aussi par un double abandon. Idem au Mans, hélas, Moss pilotant un coupé créé à la vite qu'il qualifia de "la deuxième pire voiture qu'il ait conduite". Le championnat devait se jouer à Caracas, au Venezuela. Maserati engagea quatre voitures: deux 450S, une 350S (non partante) et une 300S. Temple Buell engagea également une 450S privée, face à quatre Ferrari d'usine. Au deuxième tour, la voiture de Buell fit un tonneau. Puis ce fut Moss et sa 450S qui heurtèrent un concurrent plus lent. L'avant de la Maserati fut détruit et Moss parvint péniblement à la ramener aux stands, juste à temps pour voir la dernière 450S s'embraser lors du ravitaillement. Une fois éteinte, la voiture réussit à reprendre la piste mais alors qu'elle dépassait la 300S de Bonnier, un pneu de cette dernière éclata et les deux Maserati entrèrent en collision, allant chacune s'écraser contre un réverbère. La 450S connut un nouvel incendie, définitif cette fois.

Je n'illustre pas souvent mes pages de photos d'époque, principalement car les copyrights sont très difficiles à trouver mais voici quelques images qui illustrent le désastre de Caracas. Au moins, aucun pilote Maserati ne perdit la vie ce jour là.

       

(copyright Tom Burnside pour celle ci)

Non seulement Ferrari empocha le titre mais quatre voitures furent détruites, représentant une perte nette énorme. Ce fut le coup de grâce pour Maserati qui dut se retirer de la course automobile. Deux autres 450S furent livrées à des clients, et plusieurs moteurs partirent aux Etats Unis. Néanmoins, au fur et à mesure des courses, les moteurs des 450 furent remplacés par des V8 Chevrolet. Avec le recul, Moss déclara au sujet de la 450S qu'elle était une force brute, dépourvue de la délicatesse essentielle à la course automobile. Gonzalez aurait sans doute dit la même chose de sa 375 Plus.

Neuf exemplaires de la 450S ont vu le jour.

4501 fut construit sur la base du premier châssis de 350S, 3501 (engagé par Maserati aux Mille Miglia 54 avec Stirling Moss). C'est lui qui aurait ouvert la saison 1957 à Buenos Aires avec Moss et Fangio, sans succès. La voiture resta stockée à l'usine pour être vendue en 1965 (sans moteur) à un client américain qui fit installer un V8 Corvette. Rachetée par son propriétaire actuel en 1981, elle fut restaurée et équipée d'un moteur de 6.4 litres (version marine). Carrosserie et châssis sont d'origine et la voiture porte aujourd'hui l'identification 350 SI n°10, comme indiqué lors de sa vente en 1965. A noter que j'ai trouvé trace d'une autre 4501, renumérotée 4512 qui courut Le Mans avec une carrosserie profilée dessinée par Costin et construite par Zagato. 

       

4502 est l'une des voitures de Parravano qui fut cachée au Mexique. En 1959, elle fut tout de même vendue aux enchères par le fisc et rattrapa le temps perdu en participant à de nombreuses courses jusqu'en 1962.

       

4506 a couru avec Carroll Shelby, remportant de nombreuses victoires en SCCA. Par la suite, elle fut équipée d'un V8 américain puis d'un 6.2 Maserati issu d'un bateau de course.

4508 fut livrée à la Scuderia Temple Buell et fut l'une des voitures détruites à Caracas en novembre 1957. Une fois réparée, elle gagna de nombreuses courses en SCCA avec Masten Gregory et Carroll Shelby. En 1960 et 1961, vendue à Jim Hall, elle remporta encore une demi douzaine de courses.

       

Après la catastrophique course du Venezuela fin 1957, Maserati se retira de la course automobile. Mais après le succès commercial de la 3500GT, des fonds furent de nouveau disponibles pour développer une voiture de course. Il s'agirait uniquement d'une voiture client, mais la demande en provenance d'Amérique du Nord était particulièrement forte. Giulio Alfieri fut désigné pour concevoir la Tipo 60, en utilisant majoritairement des composants des voitures précédentes: le moteur deux litre de la 200S, la suspension des 250F... Le châssis, par contre, était entièrement nouveau. Composé de 200 tubes de faible diamètre, il était à la fois léger et rigide. Comme une partie de l'assemblage complexe de tubes était visible sous le pare-brise, la voiture fut rapidement surnommée Birdcage, la cage à oiseaux. Le moteur fut placé derrière l'essieu avant et la carrosserie en aluminium enveloppa le tout au plus près.

La Tipo 60 s'avéra bien née mais la puissance un peu juste pour prétendre au classement général malgré une victoire à Rouen en 1959 pour sa course inaugurale. Alfieri reprit le moteur de la 250S et la porta à 2.8 litres pour 250 chevaux. La Tipo 61 remporta de nombreux succès outre Atlantique et s'imposa aux 1000 km du Nürburgring en 1960. Lucky Casner et sans écurie Camoradi furent étroitement liés à l'histoire des Birdcage, achetant pas moins de quatre Tipo 61. Moss s'imposa d'ailleurs à Cuba avec l'une d'elles, devant Rodriguez sur Ferrari. Les 12 heures de Sebring 1961 se terminèrent en désastre, alors que les cinq Maserati présentes avaient devant elles une voie royale, Ferrari et Porsche s'étant retirés suite à un conflit sur le carburant. Pourtant, aucune Maserati ne rallia l'arrivée. La Tipo 61 mena la Targa Florio avant d'avoir un accident mais la course fut tout de même encourageante, après les modifications réalisées suite au fiasco de Sebring. Enfin, la voiture triompha aux 1000 kilomètres du Nürburgring. Le Mans ressembla toutefois à Sebring, avec trois abandons. Cependant, malgré leur manque de constance dans les grandes épreuves, les Birdcage se débrouillèrent très bien dans les courses mineures, en particulier aux USA. Elles remplirent donc parfaitement leur rôle: garder vivant le nom de Maserati en course, à un coût modeste grâce aux écuries privées.

La production s'établit à six exemplaires pour la Tipo 60 et seize exemplaires pour la Tipo 61.

2451 était une voiture d'usine, et la première des Birdcage. A ce titre, elle fut testée par Moss à Modène et au Nürburgring en 1959, puis remporta deux courses avant de partir chez Camoradi. Elle connut de nombreux abandons, à Buenos Aires, Sebring, à la Targa Florio, puis au Mans après avoir été convertie en version streamliner. Une fois revendue, elle connut de nombreux succès en SCCA, remportant au moins trois courses.

       

       

2454 partit elle aussi courir en SCCA, obtenant des résultats honorables.

2455 fut la première Birdcage a courir hors d'Europe aux Speed Weeks de Nassau en décembre 59. A son volant, Gus Andrey remporta le championnat 1960 de SCCA en Classe D, grâce à de nombreuses places sur le podium.

2457 a été exportée aux Etats Unis et a couru en SCCA, remportant trois victoires mais échouant deux fois à terminer les 12 Heures de Sebring.

2460 fut vendue au pilote italien Odoardo Govoni qui l'utilisa intensivement en courses de côte entre 1960 et 1961, remportant une douzaine de victoires. En 1966, elle fut entreposée chez le revendeur Maserati de Rome, jusqu'en... 2000.

2466 a été livrée neuve à la Scuderia Serenissima et a particulièrement bien figuré en courses de côte, avec une dizaine de podiums en 1960

       

2469 a eu une carrière très chargée aux Etats Unis entre 1960 et 1961, remportant au moins 8 courses et 5 podiums.

2470 a été livrée aux Etats Unis, figurant six fois sur les podiums SCCA en 1961, dont deux fois sur la plus haute marche.

2472 a fait partie de l'écurie Camoradi. Elle remporta sa classe lors des 1000 kilomètres du Nürburgring en 1961 mais fut accidentée à Pescara. Elle fut alors rhabillée par Drogo dans sa configuration actuelle avant d'être retournée à l'usine où elle fut achetée par Umberto Panini.

Grisé par son succès, Maserati développa une version à moteur arrière et une à V8 avant mais ces projets s'avérèrent trop ambitieux. Après le décès de son principal client, Lloyd Lucky Casner, patron de l'écurie Camoradi, au Mans en 1964, Maserati abandonna la compétition pour plusieurs décennies.

Voici la Tipo 63, une des premières voitures de sport italienne à présenter un moteur central arrière. Grâce à la nature même du châssis Birdcage, la solution fut facile à mettre en place. Le réservoir d'essence fut séparé en deux parties et placé dans les flancs. Le projet était de motoriser la 63 avec le V12 qui avait été expérimenté sur les 250F mais le prototype reçut un quatre cylindres. Quatre voitures furent construites pour Cunningham, Camoradi et la Scuderia Serenissima. Elles se montrèrent rapides mais fragiles, abandonnant à Sebring et à la Targa Florio. Les Tipo 63 reçurent alors le V12 de 320 chevaux et un nez un plus long. Quatre exemplaires furent engagés au Mans mais seuls trois furent prêts à temps et un seul termina la course à la quatrième place, le meilleur résultat d'une Maserati dans la Sarthe.

Cunningham rapporta l'une des voitures aux USA, puis reçut un autre exemplaire avec un empattement allongé. Les Tipo 63 remportèrent deux victoires en USAC, une série très relevée. La Serenissima s'engagea aux 4 Heures de Pescara mais après un nouvel abandon, elle retourna les voitures à l'usine. Sept exemplaires furent produits.

63.002 fut le premier châssis construit après le prototype. Il fut équipé du 4 cylindres pour participer aux 12 Heures de Sebring en 1961. Plus tard, il reçut le V12 pour Le Mans, où il termina quatrième. Le châssis fut alors retiré de la compétition et remplacé par un châssis plus long qui, pour des raisons de douanes, reprit le même numéro. Cet exemplaire resta à l'usine jusque dans les années 90 avant d'être acquis par un collectionneur passionné, qui le restaura pendant plusieurs années. Il reçut au final un V12 qui avait équipé une Cooper Maserati de Formule 1. Hélas, la carrosserie ne put être sauvée, à l'exception des portes et fut reconstruite par d'anciens artisans de chez Tourng.

       



Et voici le deuxième 63.002, le châssis long, livré à Briggs Cunningham fin 1961. La voiture fut engagée dans deux courses mais ne prit jamais le départ. A cause de la dissimulation de son véritable numéro de châssis à fins d'exportation, la voiture a donné plus d'une migraine aux historiens. En 1997, elle était encore au centre d'une bataille qui conduisit à son retrait de la vente aux enchères où elle devait apparaitre.

       

63.004 porte les prestigieuses couleurs de la Scuderia Serenissima, un aileron de requin derrière l'appuie-tête et un pare-brise enveloppant. Son histoire est assez difficile à démêler mais il semble qu'elle se présente ici dans sa livrée de la Targa Florio 1961, où elle a terminé cinquième. Elle abandonna ensuite aux 1000 kilomètres du Nürburgring. Contrairement à ce que j'ai vu sur le net, elle n'aurait pas couru au Mans, bien qu'ayant été engagée, et n'aurait pas été transformée en Tipo 64 mais vendue à un pilote amateur Suisse, André Wicky. Il s'en servit en courses de côte avant de l'exposer dans son musée privé. Dix sept ans plus tard, la voiture passa à un collectionneur Autrichien qui la restaura dans sa livrée Targa Florio actuelle.

63.006 fut elle aussi construite pour Briggs Cunningham en 1961 et courut au Mans. Elle est la seule Tipo 63 survivante avec un nez court. Elle aussi dispose d'une carrosserie refaite à neuf, à l'exception des portes.

       

Enfin, voici 63.008, qui n'est pas vraiment ce qu'elle semble être. En effet, la vraie 63.008 a été cannibalisée et ferraillée. Cet exemplaire est en fait le prototype, surnommé Muletto 002. Il a couru sous les couleurs de la Scuderia Serenissima au Mans et à Pescara en 1961, dans le cadre d'un leasing. C'est avant le Mans qu'elle a été renumérotée 63.008, pour correspondre au bulletin d'engagement. Restituée à l'usine, elle resta durant 38 ans dans un coin de l'usine, avant d'être acquise par la famille Panini et restaurée elle aussi au cours des années 90.

       



 Pour cette page, je me suis référé au livre Maserati, a racing history par Anthony Pritchard et au site maserati-alfieri. Tous les palmarès ont été pris sur Barchetta.

Libre à vous de quitter cette page par ici si vous avez terminé la consultation du site. A bientôt


Retour