Lors d'une discussion par mail récemment, une question intéressante a été soulevée: quelle est la voiture la plus exclusive que j'aie jamais conduite? J'avoue m'être pas mal creusé la tête avant d'arriver à cette terrible conclusion: aucune. La plus fun était sans conteste la Fiat Uno Turbo IE de ma mère mais malgré son rapport poids puissance renversant et son coup de pied au cul impressionnant, impossible de la classer dans la catégorie des voitures exclusives. Rendez vous fut donc pris pour que je puisse prendre le volant d'une Porsche. J'aurai décidément eu beaucoup de chance cet été après avoir profité en passager des Ferrari 599 et Scuderia.
La veille, j'étais passé à la Basilique où nous nous sommes mariés le 21 juin pour faire, pour une fois, autre chose que des photos de voitures. Evidemment, je n'ai pas résisté à faire subir aux images un traitement HDR dont je vous livre le résultat:
Nous voilà donc vendredi matin, le temps de poser Alexandre à la crèche (eh oui, nouvelles obligations dont il faut tenir compte désormais) et c'est parti pour Ornans où nous avons rendez vous. Le temps est brumeux en quittant Besançon mais ça devrait se lever. Je n'ai pas l'intention de faire de la vitesse aujourd'hui, juste de prendre un maximum de plaisir. D'ailleurs, en passant devant un sous bois laissant passer quelques rayons de soleil, je décide de m'arrêter. Puis en passant devant une tuilerie désaffectée, je m'arrête également pour faire un repérage de cet endroit plutôt propice aux images.
J'arrive pile poil à l'heure au rendez vous; la belle vient de se garer elle aussi. Il s'agit d'une Porsche 911 3.2L de 1985, couleur Or Blanc Métal, en état strictement d'origine. Elle a moins de 120 000 kilomètres, une paille pour ce moteur qui développe environ 230 chevaux. En toute franchise, j'ai cessé de m'intéresser à Porsche depuis qu'on en voit passer une par minute sur des spots comme la place de l'Etoile ou Genève, généralement en noir ou gris. Cependant, la 3.2L est la quintessence de la 911, le modèle dont l'esthétique est vraiment emblématique de la Carrera. La production a été relativement importante entre 1984 et 1989, plus de 75 000 exemplaires, ce qui explique qu'elle reste abordable: sa cote est désormais stabilisée autour de 20 000 euros suivant l'état et le kilométrage. Celle ci n'a pas le fameux aileron en table de camping et c'est tant mieux. En revanche, elle possède les jantes couleur carrosserie, disponibles en option. Elle est totalement dans son jus, jamais restaurée et pourtant dans un état superbe. Certes, il y a quelques impacts sur la peinture mais au bout de 23 ans, quoi de plus normal? En tout cas, avant même notre départ, deux personnes viennent discuter avec nous: la Carrera fait toujours rêver et reste un monument de l'Histoire de l'Automobile.
Pour le début de la virée, mon bienfaiteur, que j'appellerai A., prends le volant pour me montrer les subtilités de la voiture. Subtilité est un mot assez inapproprié quand on sait que rien n'est assisté ici. Pas d'électronique, pas d'ABS, pas de direction ou de freins assistés, pas de boite synchronisée, bref, c'est du brut de brut. On commence par profiter d'Ornans qui est un village superbe pour quelques images d'échauffement. Comment? Si si elle est sur la première!
Ici, deux façons de traiter (assez lourdement j'en conviens) une photo: la première avec un traitement tons clairs / tons foncés (shadow/highlight), la deuxième avec le désormais fameux HDR. Voyez comme la couleur très claire en plein soleil prend ici une teinte plus brune.
Et bien sûr, pour les naturalistes, brute sortie de l'appareil. On voit que le format RAW permet de récupérer pas mal de détail qui sont surexposés et donc perdus en JPG.
Ca va être à moi de m'installer au volant. Même sans être un Porschiste, ce n'est pas sans émotion que l'on s'installe derrière le volant si caractéristique, pour découvrir l'énorme compte tours juste en face de soi. La clé de contact est à gauche. L'embrayage est très dur, mais surtout la pédale revient avec une force très surprenante. Quand à la pédale de frein, elle n'a quasiment pas de course. Contact. Le flat 6 s'ébroue au quart de tour dans un bruit d'aspiration immédiatement identifiable. Je mets un peu de tour et c'est parti. Le moteur est étonnamment souple. Par contre, il faut être très vigilant en passant la troisième: si on ne vise pas bien, les pignons craquent à fendre le cœur. A. reprend le volant pour quelques kilomètres, pour me montrer ce que sa bête a dans le ventre. Jusqu'à 4000 tours minute, c'est plutôt calme, puis la poussée se fait plus franche jusqu'à 6800 tours, et le bruit se fait plus rageur. Nous arrivons à la tuilerie que j'ai repérée en venant.
Carte blanche, les clés sont sur la voiture, je peux la déplacer comme bon me semble. Quel bonheur pour un photographe de s'entendre dire çà !
Cela dit, je n'en abuse pas, juste quelques demi tours.
Cette fois, le volant est à moi pour de bon. Nous décidons de rejoindre le village de Cléron où se trouve un joli château. La troisième monte relativement haut et elle est tellement souple que je ne passe même pas la quatrième. Le sièges et les suspensions sont confortables, bien plus que dans la Scuderia mais le niveau sonore à bas régime semble plus élevé. A moins que ça ne soit l'effet des vitres ouvertes et du toit ouvrant. Dès qu'on passe 4000 tours, une poussée franche nous propulse vers l'avant: un vrai bonheur. En plus, voir la forme mythique des phares devant soi ajoute grandement au plaisir de la promenade. Arrivés sur place, nous constatons que le château est situé en surplomb de la Loue mais impossible de se placer avec la voiture. L'entrée du parc vaut cependant déjà le coup.
Nous poursuivons sur une route avant de décider de faire demi tour dans une cour de ferme. L'occasion pour A. de me donner un conseil certainement bien connu des possesseurs de propulsion ou de voitures à visibilité arrière réduite: toujours repérer précisément où va aller l'arrière de la voiture et surtout jamais les roues arrières sur un terrain meuble ou humide, sous peine de rester un jour planté. Nous revoilà à Cléron pour quelques plans génériques.
Puis avant de prendre le chemin du retour, A. me dit que l'on doit pouvoir monter sur un pont qui surplombe le village. Nous voilà parti. Un avantage de la Porsche sur la Ferrari est sa garde a sol assez haute qui lui permet de passer dans des endroits assez accidentés. Ca tombe bien, le point de vue est superbe.
Après ce shooting très original, midi approche et il va être temps pour chacun d'aller retrouver sa famille. Je garde le volant pour retourner à notre point de départ, en savourant chacun des derniers kilomètres de notre périple. C'est certain que les sensations sont bien différentes de celles ressenties en passager des Ferrari mais il faut garder à l'esprit que cette voiture à 23 ans et parvient à proposer des sensations convaincantes, alliées à une fiabilité extrême et à une facilité d'utilisation au quotidien. Elle reste toutefois une voiture d'homme sans aucune assistance qui force le respect pour les pilotes qui ont emmené ces voitures ou des Daytona Gr IV sur les routes du Monte Carlo. Voilà qui renforce mon idée de me trouver une petite classique raisonnable une fois que nous aurons acheté notre maison. Leur coté brut ne manque pas de charme et permet de se procurer de belles sensations sans nécessairement rouler à des vitesses scandaleuses.
Je reprends donc la Mégane pour revenir à la normalité: l'embrayage me parait aussi doux qu'un accélérateur et la direction est incroyablement douce. Un grand merci à A. pour la grande confiance qu'il m'a témoignée en me laissant le volant de cette petite merveille. Encore une journée mémorable !
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Enfin, difficile de ne pas saluer la mémoire du grand Phil Hill. Le pilote américain nous a quitté hier à l'âge de 81 ans. Il reste le seul pilote à avoir remporté le championnat du monde de Formule 1 et les 24 heures du Mans la même année, en 1961. Il remporta d'ailleurs cette dernière course trois fois avec Olivier Gendebien et Ferrari. Encore un grand nom qui disparait. Même si c'est dans l'ordre des choses, c'est toujours douloureux de voir partir les derniers témoins de l'âge d'or.
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